Mort de l’hôpital public : il est urgent d’agir
« Dire “venez aux urgences, vous serez pris en charge, ça va bien se passer” : c’est un mensonge », Sébastien Harscoat, urgentiste à Strasbourg. Je me suis rendu à l’appel des syndicats ce midi devant les urgences du Nouvel Hôpital Civil (NHC) à Strasbourg. C’est dans le contexte de saccage du service public hospitalier par le Gouvernement et le président Macron que j’ai apporté mon soutien aux personnels hospitaliers, en grève dans toute la France.
Alors que la pandémie de Covid a révélé l’état dans lequel se trouve l’hôpital, rien n’a été fait pour remettre sur pied ce bien commun qui fut l’orgueil de la France et qui sauve chaque jour des vies. Malgré le Ségur de la santé, la mission flash de l’été 2022, malgré la crise de cet hiver lors de la double épidémie de covid et de bronchiolite, force est de constater que rien n’est suffisant et rien n’est à la hauteur de l’enjeu à savoir la survie de l’hôpital public français.
L’arrivée des grandes chaleurs de l’été couplée au contexte des vacances estivales pour les personnels va à nouveau mettre l’hôpital à rude épreuve. À l’heure actuelle, ce qui permet de faire tenir ce service public, c’est le dévouement absolument exemplaire des personnels. Je tiens à leur apporter son soutien, à porter leurs revendications et leur colère. Je veux que le Gouvernement comprenne la nécessité urgente d’agir fort, sans quoi les conséquences pour les citoyen•nes – patients, soignants, personnels – seraient catastrophiques. Il y a urgence !
L’hôpital public sous Macron, c’est 43 décès déclarés (mais jusqu’à 150 estimés) sur des brancards depuis deux mois, selon le président du syndicat Samu-Urgence de France Marc Noizet, faute de prise en charge adéquate. Avant M. Noizet, c’était un certain François Braun qui était président de ce syndicat des médecins urgentistes. Il disait en 2019 : « La souffrance et la violence du système envers les personnes soignantes des urgences est énorme. Comment peut-on faire son métier dans des circonstances où il y a des malades plein les couloirs ? », « on peut donc penser que prêt de 100 000 personnes sont concernées par des nuits sur les brancards aux urgences. ». C’était il y a 4 ans. Aujourd’hui, avec le même François Braun ministre de la Santé, la situation s’est exponentiellement dégradée.
La solution trouvée par M. Braun pour désengorger les urgences : composez le 15 ! …sauf qu’aucun moyen n’a suivi le « tournant ambulatoire » voulu par les autorités : les appels du SAMU ont augmenté de 21,5% entre juillet 2021 et 2022 (sur 97 centres d’appels). Le SAMU subit un encombrement majeur qui a des conséquences sur la sécurité des patients. En effet, 1 personne sur 10 n’aura jamais de réponse lorsqu’elle appelle le 15, soit 2 millions d’appels en moyenne chaque année. Au SAMU de Créteil, il y a 2 médecins pour 141 appels sur 24h : alors même que la loi exige qu’un appel soit décroché normalement en moins de 30 secondes, la moyenne est de 1 minute. Pire : même pour des appels graves, il y a parfois 5 à 10 minutes d’attente. Les agents de régulation médicale (ARM) sont en sous-effectif et pour tarir ces manques, les Agences Régionales de Santé (ARS) et les ressources humaines des hôpitaux publics ont recours à des « job datings » pour embaucher des ARM, parfois sans formation.
Enfin, alors qu’1 infirmier sur 3 envisage de quitter le métier dans les 12 prochains mois, alors que 83% des infirmiers trouvent que leurs conditions de travail se sont dégradées ces derniers mois, alors que 80% des Français se disent inquiets pour l’avenir du système de santé, Bruno le Maire souhaite faire 10 milliards d’économie d’ici 2027, dont certaines sur le dos de la santé. En effet, le ministre veut lutter « contre l’explosion des arrêts maladie » et « les dérives des dépenses en médicaments ». Il envisage même d’ajouter un jour de carence, soit un jour d’arrêt maladie non payé supplémentaire pour les salariés. Ce nouveau tour de vis est tout simplement nauséabond et extrêmement malvenu quand on sait que 30% des Français ne se soignent pas pour raisons financières.